Dans
les films, les personnages principaux marchent dans un grand parc sous la
pluie. Comme par hasard, le parc est désert, alors qu’il est généralement bondé
en été. Enfin par hasard, non pas vraiment, c’est plutôt que personne n’aime
sortir quand il pleut. En fait il n’y a que dans les films que deux personnages
marchent quand même tranquillement dans les allées.
En
général, une sortie maussade, qui fait onduler les cheveux des filles, se transforme
en un moment hors du commun. On ne sait pas pourquoi on entend au loin une
mélodie triste au piano. On ne sait pas pourquoi là-bas en retrait sur le bord
du lac, il y aurait un tout petit kiosque en bois au milieu du crachin. Où
jouerait un très bon pianiste, et s’envolerait un héron. Dans les livres aussi
les choses se passent comme ça. Naoko et Watanabe auraient été portés par le
son jusqu’à trouver ce lieu reculé, qui leur aurait paru surement un instant
réel, l’instant d’après irréel. Pour ne pas déranger le musicien qui enchainerait
ses morceaux sans partition, et par respect pour le calme profond de la
matinée, ils n’auraient pas applaudi. En partant ils auraient laissé une brève
note à son attention sur les dernières touches du piano. Et s’en seraient allés
comme ils seraient venus, sans que ce moment ne laisse aucune trace dans la vie
de personne. Ou peut-être que Watanabe s’en serait souvenu par hasard au réveil
d’une sieste dans le foyer.