dimanche 20 mars 2011

Souleyman

Il y a toujours un démon derrière nos choix. Toi, tu n'existeras pas parce que je ne veux pas ton coeur séparé en quatre. Je ne veux pas de toi au milieu du Japon en ruines. Je ne veux pas de toi devant le 20h, ni toi devant des photos d'animaux éteints. Je ne veux pas de tes neurones qui dégénèrent, je ne veux pas de toi devant la porte battante de l'UHDC, je ne veux pas de bilan.

C'est pas que je ne veuille pas de toi. C'est comme de moi.

Orphelin, je vais partir dans le monde. Courir dans des pays. A la place.

Parce que je ne veux pas de toi montant les marches du pavillon de neurologie, je ne veux pas de toi arrosant les plantes du cimetière. Je ne veux pas de toi, endormie devant les dessins animés, digérant des gélules pour sauver tes poumons. Je ne veux pas te voir devant le nucléaire, je ne veux pas t'entendre dire que ça ira mieux demain, je ne veux pas te voir lire le programme de Marine, je ne veux pas savoir que tu fais des voeux, qui ne sont pas exaucés, qui ne sont pas entendus, qui partent dans l'air.

Je vais faire le tour de la terre, trois fois, vingt fois, des milliers de fois pour qu'il ne reste plus de fantômes. La tienne aura du mal parce qu'il sera tard, mais il reste une chance à ma peau à moi.

D'autres petits lancent des sos à travers les forêts et l'océan, on ne sera pas assez d'une seule maman à relever nos manches. Tout l'amour inimaginable que j'aurais eu pour toi sera ailleurs, deviendra de l'eau salée, des dunes de sable, comme les os de mes grand mères et de celles des autres. Il fera pousser des fruits, du pelage, des hectares d'Amazonie, de la salicorne, des petits homards, du thon rouge, du corail, du Céphalorynque d'Hector. A ce moment la je serais sauvée, et toi aussi. Viendra un jour, mes bottes dans la boue, ou tout ça sera loin.

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